La course aux armements nucléaires connaît une accélération préoccupante, alimentant les tensions géopolitiques. Selon les dernières estimations de la Fédération des scientifiques américains et de l’Aide populaire norvégienne, plus de 9 600 ogives nucléaires sont actuellement opérationnelles, et près de 40 % sont prêtes à être déployées immédiatement. Cette montée en puissance, particulièrement marquée en Asie, reflète une dynamique mondiale où la dissuasion reste un pilier stratégique des grandes puissances.
Les États-Unis et la Russie dominent toujours le paysage nucléaire avec respectivement 3 700 et 4 299 ogives en état de fonctionnement. Toutefois, la Chine, avec ses 600 têtes nucléaires, affiche une progression inquiétante, notamment en raison d’un renforcement rapide de ses capacités balistiques. La France (290), l’Inde (180) et le Pakistan (170) maintiennent des arsenaux significatifs, tandis que la Corée du Nord, malgré les sanctions internationales, disposerait d’au moins 50 ogives prêtes à l’emploi.
Les armes nucléaires se déclinent sous diverses formes, allant des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) aux bombes thermonucléaires. Ces dernières, bien plus puissantes que les bombes à fission, combinent fission et fusion pour générer des explosions aux conséquences catastrophiques. Elles peuvent être déployées depuis des sous-marins stratégiques, des bases terrestres ou des bombardiers, offrant aux États détenteurs une flexibilité d’utilisation redoutable.
Cette prolifération s’inscrit dans un contexte où les efforts de désarmement peinent à se concrétiser. Le Traité de non-prolifération (TNP), bien qu’en vigueur depuis 1968, montre ses limites face à la volonté des États nucléaires de moderniser leurs arsenaux. En parallèle, le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), adopté en 2017, vise une élimination totale de ces armements, mais il demeure largement contesté par les puissances détentrices.
En 2024, des pays comme l’Indonésie, la Sierra Leone et les îles Salomon ont rejoint le TIAN, portant à plus de la moitié le nombre d’États signataires. Cependant, l’opposition des neuf États nucléaires et des 34 pays bénéficiant du « parapluie nucléaire » américain entrave toute avancée significative. Washington et Moscou, en particulier, refusent de s’engager dans un désarmement unilatéral, invoquant des enjeux de sécurité nationale et d’équilibre stratégique.
L’Australie, bien que favorable à la non-prolifération, n’a toujours pas ratifié le TIAN, estimant que le TNP constitue une approche plus réaliste pour encadrer la réduction des arsenaux. L’Europe, de son côté, reste divisée sur la question, certains pays privilégiant la dissuasion comme outil de stabilité géopolitique.
L’avenir du désarmement nucléaire apparaît donc incertain. L’accumulation des stocks et l’évolution rapide des technologies de frappe augmentent les risques d’escalade et de conflits accidentels. Sans une volonté politique forte et des mécanismes de contrôle renforcés, la menace nucléaire continuera de peser lourdement sur l’équilibre mondial.