Sous la pression des autorités espagnoles et après des années de contentieux juridiques, la plateforme de livraison à domicile Glovo a annoncé un changement radical de son modèle économique en Espagne. Les livreurs, jusque-là considérés comme travailleurs indépendants, bénéficieront désormais de contrats de travail.
Une décision historique pour Glovo
L’annonce a été faite lundi par le groupe allemand Delivery Hero, actionnaire majoritaire de Glovo. Ce changement vise à mettre fin à l’ »incertitude juridique » entourant les activités de la plateforme en Espagne, tout en ayant un impact financier non négligeable : environ 100 millions d’euros sur le revenu brut d’exploitation de l’entreprise en 2025.
Ce virage intervient alors que le fondateur de Glovo, Oscar Pierre, est convoqué devant un juge à Barcelone pour des accusations de pratiques contraires au droit du travail. Une source judiciaire indique que ces accusations pourraient peser lourdement sur l’entreprise.
Un bras de fer avec les autorités
Fondée à Barcelone en 2014, Glovo a été au cœur de la controverse depuis l’entrée en vigueur en 2021 de la « loi Rider », une réforme pionnière du droit du travail espagnol. Cette loi instaure une « présomption de salariat » pour les coursiers des plateformes numériques, poussant plusieurs entreprises, comme Uber Eats et Deliveroo, à embaucher des milliers de livreurs.
Cependant, Glovo avait contourné cette législation en maintenant une partie de ses livreurs sous un statut d’indépendants. Cette stratégie avait conduit le gouvernement espagnol à infliger deux lourdes amendes, totalisant 205 millions d’euros, que l’entreprise avait contestées en justice.
Des répercussions économiques et sociales
La décision de salarier les livreurs en Espagne marque un tournant pour Glovo, mais elle soulève également des inquiétudes chez les investisseurs. À la bourse de Francfort, l’action de Delivery Hero a chuté de 7,87 % lundi, traduisant la crainte d’une baisse de rentabilité.
Cette annonce illustre un défi plus large auquel font face les plateformes numériques dans de nombreux pays. En Europe, la directive adoptée en octobre 2024 pour requalifier les travailleurs indépendants des plateformes numériques en salariés reflète une volonté croissante de réguler ce secteur. Cependant, sa mise en œuvre reste complexe et dépend des lois nationales.
Une étape cruciale pour les droits des travailleurs
La décision de Glovo a été saluée par le gouvernement espagnol, qui voit dans cette évolution une victoire pour le respect des lois du travail. « Aucune grande entreprise n’est au-dessus des lois », a affirmé Yolanda Diaz, ministre du Travail, sur les réseaux sociaux.
Ce changement en Espagne pourrait bien annoncer une transformation plus large pour Glovo et d’autres plateformes opérant à l’échelle mondiale, confrontées à des exigences similaires en matière de droits sociaux et de travail.