Les aliments ultra-transformés (AUT) ont été placés sous le feu des projecteurs par les nutritionnistes en raison de leurs effets potentiellement néfastes sur la santé. Ces produits, qui incluent des articles comme les nuggets de poulet, les snacks emballés, les boissons gazeuses, et même le pain complet tranché, représentent plus de la moitié des calories consommées au Royaume-Uni. Caractérisés par leurs nombreux processus industriels et leurs ingrédients souvent incompréhensibles, les AUT sont riches en graisses, en sucre ou en sel, et attirent l’attention de ceux qui prônent un mode de vie sain.
Les preuves de la nocivité des AUT continuent de s’accumuler, bien que les experts peinent à s’accorder sur la manière exacte dont ils affectent notre santé. Des études récentes montrent que ces aliments sont liés à des problèmes de santé majeurs tels que le cancer, les maladies cardiaques, l’obésité et la dépression. Par exemple, une étude observationnelle de l’American Society for Nutrition a révélé que les consommateurs d’AUT ont 10 % de risques supplémentaires de mourir prématurément. Toutefois, cette corrélation n’établit pas de causalité et ne précise pas quel aspect des processus de transformation est en cause.
Prouver de manière définitive que les AUT sont nocifs nécessiterait des études complexes et coûteuses. Le Dr Nerys Astbury de l’Université d’Oxford explique qu’il faudrait comparer des régimes strictement contrôlés, riches et pauvres en AUT, avec des participants aux habitudes de vie similaires. Ces études seraient difficiles à réaliser en raison de la logistique, du coût et du risque élevé de défection des participants.
Duane Mellor, responsable de la nutrition à l’Université d’Aston, souligne que la science de la nutrition ne peut pas prouver qu’un aliment est bon ou mauvais, mais seulement montrer des risques ou avantages potentiels. La recherche actuelle sur les additifs alimentaires présents dans les AUT tente de clarifier leur impact, mais la définition même des AUT pose problème. Ils comprennent généralement plus de cinq ingrédients, souvent des produits bon marché transformés pour améliorer le goût et l’apparence.
Cette catégorisation inclut des aliments variés, des céréales sucrées aux yaourts allégés, soulevant des questions sur leur utilité et leur impact différentiel. Le professeur Carlos Monteiro, qui a inventé le terme « aliment ultra-transformé » et développé le système de classification Nova, croit que notre santé est influencée par les processus industriels utilisés pour fabriquer et conserver les aliments. Il admet que l’attention sur les AUT contribue à un changement de paradigme dans la science de la nutrition, mais certains nutritionnistes considèrent cette peur comme exagérée.
Gunter Kuhnle, professeur de nutrition à l’Université de Reading, critique le concept d’AUT pour sa vague définition et son message négatif. Il souligne que la transformation alimentaire, que ce soit à la maison ou à grande échelle, n’est pas intrinsèquement nocive et peut même améliorer la sécurité et la durabilité des aliments. Par exemple, les bâtonnets de poisson surgelés, bien que classés comme AUT, sont sains et pratiques.
Les produits de substitution de la viande comme le Quorn, bien que considérés comme AUT, sont nutritifs. La Food Standards Agency en Angleterre reconnaît les rapports sur les risques des AUT mais attend des preuves concrètes avant d’agir. Le Scientific Advisory Committee on Nutrition du gouvernement a également exprimé des doutes quant à l’application du système Nova au Royaume-Uni.
Le professeur Monteiro s’inquiète particulièrement des processus impliquant une chaleur intense, qui dégradent la structure naturelle des aliments et réduisent leur valeur nutritive. Cependant, il est difficile d’ignorer le sentiment croissant de suffisance morale et de snobisme autour des AUT, ce qui peut rendre les consommateurs coupables de les manger.
Le Dr Adrian Brown, diététicien à l’University College London, avertit contre la diabolisation des AUT, soulignant que l’alimentation est une question complexe. Vivre sans AUT peut être coûteux et chronophage. Un rapport de la Food Foundation montre que les aliments sains sont deux fois plus chers que les moins sains, rendant difficile pour les ménages les plus pauvres de suivre les recommandations diététiques.
En fin de compte, les conseils bien connus restent pertinents : manger plus de fruits, légumes, céréales complètes et légumineuses, tout en réduisant les snacks gras et sucrés. Ces recommandations sont valables, que la science prouve ou non la nocivité des AUT.