L’intelligence artificielle (IA) générative, ces outils capables de rédiger des textes, de créer des images ou de résoudre des problèmes complexes, est devenue incontournable dans de nombreux domaines. Pourtant, cette révolution technologique a un coût caché, souvent ignoré : son impact environnemental. Bien que les utilisateurs de ces outils n’aient pas une idée précise de la quantité d’énergie, d’eau et de ressources consommées par ces systèmes, les récentes études montrent que cette consommation est bien plus importante que ce que l’on pourrait imaginer.
Une consommation d’énergie élevée
Chaque requête envoyée à une IA générative, comme ChatGPT ou DeepSeek, a un coût énergétique. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), une simple question posée à ChatGPT consomme 2,9 Wh d’électricité, soit dix fois plus qu’une recherche effectuée sur Google. Et avec près de 1 milliard de requêtes envoyées chaque jour à ChatGPT, la consommation totale d’électricité devient astronomique. À l’échelle mondiale, les data centers, qui alimentent ces systèmes, ont représenté près de 1,4 % de la consommation électrique en 2023, et ce chiffre pourrait presque tripler d’ici 2030, atteignant 3 % de la consommation totale.
Les data centers, ces gigantesques infrastructures servant à stocker les données et à exécuter les calculs nécessaires à l’intelligence artificielle, nécessitent des quantités d’énergie colossales. Ce phénomène est exacerbé par la multiplication des usages de l’IA. Des études prévoient même que d’ici 2027, 40 % des centres de données dédiés à l’IA pourraient faire face à une insuffisance d’approvisionnement en électricité.
Un impact carbone considérable
L’entraînement d’un modèle d’IA de grande envergure, comme GPT-3 de OpenAI, peut générer jusqu’à 300 tonnes de CO₂, l’équivalent de 125 allers-retours entre New York et Pékin. Ce chiffre illustre bien l’ampleur des émissions liées à la création de ces systèmes. Bien que les entreprises ne communiquent pas toujours sur ces chiffres, des chercheurs ont estimé que la seule phase d’entraînement d’un modèle peut représenter une empreinte carbone significative. Et l’impact ne s’arrête pas là : chaque interaction avec l’IA, qu’il s’agisse de poser une question ou de générer du contenu, ajoute à cette empreinte écologique.
La consommation d’eau : un facteur méconnu
Les data centers, pour fonctionner à plein régime, nécessitent des systèmes de refroidissement, souvent à base d’eau. Ce facteur, encore trop souvent ignoré, contribue de manière importante à l’empreinte environnementale de l’IA. Une étude de 2023 a révélé que les besoins en eau des centres de données alimentant l’IA pourraient atteindre entre 4,2 et 6,6 milliards de mètres cubes en 2027. Cela représente l’équivalent de quatre à six fois la consommation annuelle en eau du Danemark. L’utilisation de l’eau dans ces systèmes, combinée à l’extraction de ressources pour les équipements électroniques, soulève des préoccupations majeures quant à la soutenabilité de l’IA à grande échelle.
Les déchets électroniques : un coût supplémentaire
L’essor des IA génératives contribue également à l’accumulation de déchets électroniques. En 2023, ces technologies ont généré environ 2 600 tonnes de déchets liés aux serveurs, cartes graphiques et autres équipements nécessaires à leur fonctionnement. Ce chiffre devrait augmenter de manière exponentielle avec la croissance de la demande, atteignant potentiellement 2,5 millions de tonnes d’ici 2030. L’extraction de métaux rares, nécessaires pour la fabrication de ces équipements, génère également des impacts environnementaux considérables, en particulier en Afrique, où les méthodes d’extraction sont souvent polluantes.
Les solutions et pistes d’amélioration
Face à ce constat alarmant, des initiatives émergent pour rendre l’IA plus respectueuse de l’environnement. Des projets comme DeepSeek, qui cherche à réduire la consommation d’énergie en optimisant les modèles d’IA, montrent qu’il est possible de concevoir des solutions plus écologiques. En réduisant le nombre de paramètres nécessaires pour atteindre des résultats satisfaisants, ces technologies permettent de limiter l’empreinte énergétique et d’offrir une alternative plus durable. Toutefois, même avec ces progrès, la multiplication des requêtes et l’augmentation des usages pourraient entraîner un « effet rebond », où la baisse du coût énergétique pourrait encourager une utilisation plus fréquente, amplifiant ainsi les impacts environnementaux.
Des chercheurs suggèrent également de mettre en place un écoscore, à l’instar des systèmes utilisés pour les produits alimentaires, afin que les utilisateurs puissent mesurer l’impact écologique de leurs interactions avec l’IA. Ce type d’outil inciterait à une utilisation plus consciente de ces technologies, limitant leur usage aux seules situations où elles sont réellement nécessaires.
L’IA, un outil de transition écologique ?
L’IA possède également un potentiel de transformation dans le domaine de la transition écologique. Par exemple, des modèles d’IA sont déjà utilisés pour optimiser la position des panneaux solaires ou pour prévoir les impacts climatiques. Cependant, si l’IA est utilisée de manière excessive ou à des fins récréatives, elle pourrait nuire à ses propres objectifs écologiques. Les chercheurs s’accordent à dire qu’il est crucial de repenser les usages de l’IA et de privilégier des interactions courtes et ciblées, en utilisant ces outils de manière rationnelle.
Vers une IA durable : comprendre et réduire son impact environnemental
L’IA générative est une technologie puissante, mais son impact environnemental ne doit pas être sous-estimé. Entre la consommation d’énergie, l’empreinte carbone, l’utilisation de l’eau et la production de déchets électroniques, il est impératif d’adopter une approche plus durable de ces outils. Alors que des solutions commencent à émerger pour rendre l’IA plus écologique, l’essentiel reste la prise de conscience des utilisateurs et des entreprises quant à l’ampleur des enjeux écologiques liés à l’intelligence artificielle.