La montée en puissance de l’intelligence artificielle générative (IA gén) modifie en profondeur le monde du travail. D’après un article publié par la Harvard Business Review et signé par Joseph Fuller, Matt Sigelman et Michael Fenlon, environ 50 millions d’emplois seront affectés par cette technologie dans les années à venir. Si certains travailleurs verront leurs compétences renforcées, d’autres seront remplacés, conduisant à une réorganisation du paysage professionnel.
Une redéfinition des critères d’évaluation des talents
Traditionnellement, les employeurs se basent sur l’expérience, les diplômes et les compétences techniques pour recruter. Or, l’IA gén bouleverse ces critères en automatisant certaines tâches et en facilitant l’accès à des compétences auparavant complexes. Si certains estiment que cela favorisera l’inclusion professionnelle, d’autres craignent une diminution des opportunités pour les débutants.
En effet, une étude réalisée par le Burning Glass Institute et le Harvard Business School Project on Managing the Future of Work indique que 12 % des travailleurs américains exercent un métier où l’IA risque de supprimer les postes d’entrée de gamme. Cela se vérifie déjà avec l’essor de Microsoft Copilot, qui ralentit le recrutement d’ingénieurs logiciels juniors. Paradoxalement, 19 % des travailleurs pourraient voir leur secteur s’ouvrir à des personnes sans formation technique avancée, grâce à l’automatisation des tâches complexes.
L’impact sur les courbes d’apprentissage et les évolutions salariales
Les courbes d’apprentissage varient fortement selon les professions. Certains emplois, comme chauffeur VTC, permettent une productivité rapide, tandis que d’autres, comme ingénieur ou analyste financier, nécessitent une montée en compétences progressive.
L’analyse de millions d’offres d’emploi sur deux ans révèle que les professions avec une forte différence de salaire entre débutants et expérimentés sont les plus vulnérables à l’IA. Dans des domaines tels que la gestion de projet, le design web et l’analyse des risques financiers, l’IA renforce les compétences des seniors tout en limitant les embauches de juniors.
Par exemple, un analyste crédit confirmé pourra utiliser l’IA pour évaluer des entreprises et élaborer des stratégies de financement, réduisant ainsi le besoin d’assistants chargés de la collecte de données.
Une ouverture de l’accès à certaines professions
Si l’IA restreint l’accès à certains métiers, elle en ouvre d’autres. L’étude a identifié 100 professions, regroupant 28,6 millions de travailleurs (20 % de la population active américaine), où l’IA facilite l’entrée sur le marché du travail.
Ces emplois concernent notamment les administrateurs réseau, les dessinateurs industriels et les chefs de chantier. L’IA permet une acquisition rapide des compétences techniques, remplaçant une partie du savoir-faire empérique par des outils assistés.
Les secteurs de la conception graphique, du développement informatique et de l’analyse de données sont particulièrement impactés. L’IA permet à des personnes peu expérimentées d’exécuter des tâches complexes, rendant ces professions plus accessibles.
La transformation des entreprises face à l’IA
Une nouvelle structure organisationnelle
L’automatisation des tâches d’entrée de gamme pourrait modifier la hiérarchie des entreprises. Alors qu’un manager disposait auparavant de plusieurs juniors sous sa supervision, ce ratio pourrait diminuer drastiquement, réduisant la structure pyramidale.
Certaines entreprises adopteront des modèles plus plats ou en losange, avec moins de niveaux intermédiaires. Cela facilitera une prise de décision rapide, mais limitera les opportunités de promotion, rendant l’accès aux postes de management plus complexe.
Une stratégie de gestion des talents à revoir
Les entreprises devront adapter leur stratégie de recrutement et de formation. Plutôt que d’embaucher des débutants, elles chercheront des profils qualifiés pouvant être opérationnels immédiatement.
Les modèles traditionnels d’apprentissage pratique devront évoluer pour permettre aux employés de se former tout en travaillant avec l’IA. L’investissement dans des formations personnalisées deviendra un enjeu majeur pour garantir la compétitivité des entreprises.
L’urgence d’une adaptation aux nouveaux modèles professionnels
L’intelligence artificielle générative est déjà une réalité qui redessine le marché du travail. Si certaines professions voient leur accès se restreindre, d’autres deviennent plus accessibles. Les entreprises qui sauront s’adapter rapidement en redéfinissant leurs structures et leurs stratégies de gestion des talents tireront leur épingle du jeu dans cette transformation inéluctable.