Pavel Durov, le créateur de la célèbre application de messagerie Telegram, se retrouve dans une situation juridique délicate en France. Après avoir été placé en garde à vue pendant près de quatre jours, il a été mis en examen par deux juges parisiens pour une douzaine de chefs d’accusation. Ce placement en examen, accompagné d’un contrôle judiciaire strict, impose au milliardaire franco-russe de verser une caution de 5 millions d’euros et de respecter une interdiction de quitter le territoire français. Ce développement marque une étape cruciale dans une enquête qui pourrait redéfinir la responsabilité des dirigeants de plateformes numériques.
Les accusations contre Durov sont d’une gravité notable. Il est notamment soupçonné de complicité dans divers délits, y compris la gestion d’une plateforme en ligne facilitant des transactions illicites. Depuis sa création en 2013, Telegram a été observée de près par les autorités, qui y ont découvert une multitude d’activités criminelles, allant de la diffusion d’images pédopornographiques au trafic de drogue, en passant par la vente de numéros de cartes bancaires volés et de faux permis de conduire. Ce qui distingue Telegram des autres plateformes, selon le parquet de Paris, c’est son refus quasi systématique de collaborer avec la justice, en France et dans d’autres pays européens.
Pavel Durov été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire avec notamment l’obligation de remettre un cautionnement de 5 millions d’euros, l’obligation de pointer au commissariat deux fois par semaine, et l’interdiction de quitter le territoire français. #telegram pic.twitter.com/ff6ZGYsHLW
— Éric Bothorel (@ebothorel) August 28, 2024
Cette situation a conduit les autorités françaises à ouvrir une enquête en février dernier pour examiner la responsabilité des dirigeants de Telegram, notamment Pavel Durov et son frère Nikolai, l’informaticien derrière l’application. La surprise a été grande lorsque Durov, désormais résident de Dubaï, a atterri samedi soir à Paris, offrant ainsi aux magistrats l’opportunité de l’interpeller.
Les questions soulevées par cette affaire sont inédites et touchent au cœur de la régulation des plateformes numériques. Peut-on tenir les responsables d’une application comme Telegram pour complices des activités illicites de leurs utilisateurs? Cette interrogation pourrait bien devenir centrale dans la suite de la procédure judiciaire.
À sa sortie discrète du tribunal judiciaire, Durov a laissé son avocat, David-Olivier Kaminski, s’exprimer en son nom. Ce dernier a déclaré : « Telegram se conforme en tous points aux règles européennes concernant le numérique. Il est totalement absurde de penser que le responsable d’un réseau social puisse être impliqué dans des faits criminels qui ne le regardent ni directement ni indirectement. »
Depuis qu’il a quitté la Russie en 2017, Durov s’était fait rare à Paris, malgré l’obtention d’un passeport français en 2021. Désormais contraint de pointer au commissariat deux fois par semaine, il se prépare à une procédure qui pourrait bien changer la donne en matière de régulation des plateformes numériques.