Le récent rapport de Bank Al-Maghrib dévoile des tendances inquiétantes pour l’emploi au Maroc. Entre 1999 et 2023, l’emploi salarié a crû annuellement de 2,1 %, bien au-dessus de la croissance de 0,8 % de l’emploi total. Cette progression s’est accélérée en 2023 avec une hausse de 10,4 % du nombre de salariés, portant le taux de salariat à 58,9 %. Cependant, ce taux reste faible comparé à des pays comme l’Espagne (84,6 %) et l’Égypte (73,7 %). De plus, des disparités persistent entre les milieux urbains et ruraux et entre les genres, avec un salariat plus répandu en zones urbaines et chez les hommes.

Malgré cette dynamique, les conditions de travail des salariés marocains demeurent précaires. En 2023, plus de la moitié des 6,2 millions de salariés n’avaient pas de contrat de travail, les privant de protection juridique et de droits essentiels. Plus alarmant, 54,2 % des salariés n’avaient pas de couverture médicale et seuls 44,4 % bénéficiaient d’un régime de retraite, laissant une grande partie sans sécurité financière post-retraite. La formation continue est également négligée, avec 97,6 % des salariés n’ayant reçu aucune formation financée par l’employeur.

Paradoxalement, malgré ces conditions précaires, l’auto-emploi ne séduit pas les Marocains. En 2019, 71,9 % des chômeurs aspiraient à un emploi salarié, une préférence marquée chez les femmes et les diplômés de l’enseignement supérieur. Cette réticence envers l’auto-emploi reflète une faible culture entrepreneuriale, malgré les initiatives publiques comme le statut d’auto-entrepreneur lancé en 2015. Ce statut, visant à faciliter l’entrepreneuriat avec une fiscalité allégée, avait initialement suscité de l’engouement, atteignant 406 301 inscriptions fin 2022. Cependant, en novembre 2023, le nombre d’auto-entrepreneurs actifs avait chuté à 396 387, une baisse de 2,5 % en moins d’un an.

Plusieurs facteurs expliquent cette baisse : l’introduction de cotisations à l’assurance maladie obligatoire en février 2022, augmentant le coût du régime, et le relèvement en 2023 des barèmes d’imposition pour les auto-entrepreneurs générant plus de 80 000 dirhams de chiffre d’affaires annuel avec un même client. Ces mesures, couplées à une conjoncture économique difficile, ont découragé de nouvelles créations d’entreprises individuelles. Ainsi, le statut d’auto-entrepreneur, bien qu’initialement prometteur, semble désormais insuffisant pour stimuler l’entrepreneuriat au Maroc. Des ajustements réglementaires et fiscaux s’imposent pour revitaliser cet élan entrepreneurial et créer un écosystème plus favorable aux auto-entrepreneurs.

Rapport de Bank Al-Maghrib les défis de l’emploi et de l’auto-entrepreneuriat au Maroc
 

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