La récente annonce de Sanofi concernant la vente potentielle de sa filiale Opella, connue pour la production du Doliprane, à l’investisseur américain CD&R, soulève une vague d’inquiétude à travers la France. Ce transfert de propriété, évalué à plus de 15 milliards d’euros, met en lumière les préoccupations grandissantes relatives à la souveraineté sanitaire du pays. Emmanuel Macron a affirmé que le gouvernement possédait les outils nécessaires pour garantir la protection de la France dans ce contexte incertain. Cette déclaration intervient alors que des représentants syndicaux expriment leur souhait de maintenir Opella sous l’égide de Sanofi pour éviter toute déstabilisation de la production locale.
Le Doliprane, médicament emblématique de la pharmacie française, a été sous la houlette de Sanofi pendant plus de 50 ans. Sa cession envisagée à CD&R, une entreprise réputée pour ses capacités d’investissement, pourrait avoir des répercussions importantes sur l’emploi et la disponibilité de ce produit essentiel sur le marché. Les inquiétudes sont d’autant plus vives dans les milieux politiques où des figures de différents bords critiquent la transaction, craignant qu’elle n’entraîne une perte de contrôle sur les approvisionnements en médicaments. Jordan Bardella, président du Rassemblement National, a qualifié cette opération de « vente à la découpe de la France », tandis que d’autres, comme Marine Tondelier des Verts, ont évoqué l’absence de leçons tirées des crises sanitaires précédentes.
Du côté syndical, les délégués de la CFDT et de la CGT, en particulier à Lisieux, où le Doliprane est fabriqué, s’alarment des conséquences sur l’emploi des 1 700 salariés concernés. Ils craignent que cette opération ne fragilise la production locale, essentielle pour le marché français. Malgré ces préoccupations, Sanofi a assuré que la séparation de sa filiale ne signifierait pas l’arrêt de la vente du Doliprane en France, soulignant que les consommateurs continueraient d’accéder à ce médicament en pharmacie. En effet, le laboratoire a récemment investi 50 millions d’euros dans le site de Lisieux au cours de la dernière décennie et prévoit un investissement supplémentaire de 20 millions d’euros pour augmenter la capacité de production de 40 % dans les années à venir. De plus, Sanofi conserve une part de 50 % dans Opella pour les cinq prochaines années, et des engagements sociaux pris avec CD&R sont censés garantir la pérennité des installations en France.
La volonté du gouvernement de surveiller cette transaction est également manifeste, avec les interventions des ministres de l’Économie et de l’Industrie, Antoine Armand et Marc Ferracci, qui exigent des garanties quant au maintien du siège d’Opella en France ainsi que de ses centres de décision. La possibilité de recourir à un contrôle accru des investissements étrangers pourrait également ralentir ou bloquer cette vente, ajoutant une couche d’incertitude à l’opération. Bien que CD&R ait été choisi en raison de sa solide capacité financière à soutenir la croissance d’Opella, les craintes des syndicats et de la classe politique demeurent palpables. Le Doliprane, bien plus qu’un simple produit de santé, symbolise une question cruciale de souveraineté industrielle et de protection des emplois en France, d’autant plus que des tensions concernant la production de paracétamol ont été constatées lors de l’hiver 2022-2023.
Cette situation souligne l’importance de la vigilance dans le secteur pharmaceutique, où la gestion des stocks et la sécurité de l’approvisionnement sont primordiales pour garantir la continuité des soins de santé. La cession de Doliprane à un fonds américain n’est pas qu’une simple transaction financière; elle engage des enjeux de sécurité nationale, de souveraineté et de responsabilité sociale qui interpellent l’ensemble des acteurs impliqués. Le débat est loin d’être clos et les prochaines étapes de cette vente seront scrutées de près par les médias, les politiques et les syndicats, dans l’attente de réponses claires sur l’avenir du Doliprane en France.