Dans une démarche audacieuse de diversification culturelle et économique, le ministère de l’Éducation saoudien a décidé d’introduire l’enseignement du mandarin dans les collèges publics du royaume. Désormais, cette langue, parlée par plus d’un milliard de personnes à travers le monde, est considérée comme un atout majeur pour l’avenir professionnel des jeunes Saoudiens.
Dans l’établissement du nord de Riyad, Yasser al-Shaalan, 14 ans, incarne ce changement. Devant une carte de la Chine accrochée au mur, l’élève apprend les noms de métiers en mandarin à l’aide d’un manuel spécialement conçu pour cet enseignement. « Les élèves des autres écoles se contentent de maîtriser l’anglais, alors que je parle l’arabe, l’anglais et le chinois. Pour moi, c’est un avantage certain pour l’avenir », explique-t-il, vêtu de son uniforme traditionnel.

Depuis août, l’enseignement du mandarin est instauré dans six régions stratégiques du royaume. La nouvelle discipline, positionnée en seconde langue étrangère après l’anglais, fait l’objet d’un programme progressif, qui s’étendra du collège jusqu’au lycée. Les élèves bénéficient de trois cours hebdomadaires, dispensés par Ma Shuaïb, un professeur chinois et musulman, qui n’hésite pas à recourir à des outils numériques, à des gestes et à des jeux interactifs pour rendre l’apprentissage accessible et ludique. Bien que le chinois soit réputé difficile, l’approche pédagogique adoptée permet de mettre l’accent sur l’écoute, l’expression orale et la lecture avant d’aborder l’écriture, véritable défi pour beaucoup.
Cette initiative s’inscrit dans le cadre d’un renforcement des liens entre Riyad et Pékin. Suite à la visite de la Chine par le prince héritier Mohammed ben Salmane en 2019, le royaume a accéléré l’intégration du mandarin dans son système éducatif. De nombreuses universités saoudiennes proposent désormais des programmes en chinois, et l’inauguration en 2023 de la première antenne de l’Institut Confucius à Riyad témoigne de l’importance stratégique accordée à cette langue.

Au-delà du simple apprentissage linguistique, l’objectif est clair : préparer une nouvelle génération de citoyens aptes à évoluer dans un environnement économique mondialisé. Alors que l’Arabie saoudite entretient des relations commerciales de plus en plus étroites avec la Chine – principal partenaire commercial et premier marché énergétique du royaume – la maîtrise du mandarin devient un véritable levier de compétitivité. Des milliers de travailleurs chinois opèrent déjà en Arabie saoudite, renforçant ainsi les échanges et les investissements bilatéraux.
« Le chinois est la langue du futur pour la communication économique. La coopération avec la Chine est essentielle pour la diversification de notre économie, qui dépend encore largement des revenus pétroliers », souligne Sattam al-Otaibi, directeur du collège.
Alors que Riyad multiplie les initiatives pour former ses citoyens à ces enjeux mondiaux, l’enseignement du chinois s’affirme comme un symbole fort de la transition vers une économie du savoir, en phase avec les ambitions du royaume sur la scène internationale.